Pour une retraite tout au long de la vie
Il y a une énigme dans le débat sur les retraites. On sait au moins depuis le Livre blanc de 1991 que le système actuel ne peut pas tenir — il y a toujours plus de pensionnés pour moins de cotisants —, et pourtant les réformes peinent à se mettre en place et accumulent les retards. On a identifié avec certitude les trois leviers d’action possibles — revoir la durée de cotisation, retarder le départ en retraite, abaisser le montant des pensions —, mais, faute de consensus, il est impossible de les mettre en place de manière équilibrée. On nous a expliqué que la répartition était menacée par la démographie, tandis que la capitalisation était mise en péril par les soubresauts de la finance, mais la combinaison des deux reste toujours incertaine. Pourquoi un tel écart entre le diagnostic et la thérapie ? Sans doute parce que, en France tout au moins, la force du symbole prend souvent le pas sur la puissance du réel ; et le XXe siècle a tellement peiné à réaliser les rêves du XIXe qu’on voit mal comment le jeune XXIe mettrait tout cela à bas d’un seul coup d’un seul.
Et pourtant, il le faudra bien. Mais cela ne se fera de manière pacifiée que si l’on déplace vers le terrain du symbole et du sens sans se contenter d’un discours exclusivement technique, comptable et négatif. Car, ce n’est pas en insistant sur les seules contraintes démographiques, économiques et budgétaires — pourtant incontestables — qu’on parviendra à concurrencer et relancer l’épopée des conquêtes sociales. Or, en répétant depuis presque vingt ans qu’« on va dans le mur ! », on a fini par oublier que la réforme des retraites mettait aussi en jeu des dimensions existentielles et positives. Les questions sont pourtant massives : que faire du temps gagné sur la mort ? Doit-il être affecté à la période inactive de l’existence alors même que le travail continue d’être le principal vecteur d’identité de la personne ? La retraite, jadis conçue comme un bref repos après une vie de labeur, doit-elle constituer la majeure part de l’existence ? Faut-il se résoudre à la perspective d’une vie ainsi découpée : 30 ans de formation ; 30 ans d’activité ; 30 ans de retraite ? En admettant même que ce soit possible, est-ce souhaitable ?
Rien n’est moins sûr. On le perçoit d’emblée pour les deux premières périodes. La formation se fait « tout au long de la vie » et déborde de la seule jeunesse : au-delà de l’éducation initiale, c’est une nécessité de la vie professionnelle (formation continue) et c’est une aspiration de la période post-professionnelle (université du 3e âge, reprise tardive d’études). De la même manière, l’exigence d’une activité rémunérée, concerne aussi bien la jeunesse (le job) que la vieillesse (la seconde carrière). Et si nombre de nos concitoyens aspirent à la retraite, ce n’est pas pour cesser toute espèce d’activité, mais de plus en plus, pour en envisager une autre, plus sereine, moins frénétique et peut-être plus libre (comme le montre le succès de l’auto-entrepreneur). Il y a donc aussi une « activité tout au long de la vie »
1 commentaire:
Le groupe des experts de l'OCDE sont-ils des références ? Ils ont exigé que l'enseignement supérieur devienne un marché de services plus qu'une institution de la république, et sont en train de réussir, grâce à leurs amis bourgeois des gouvernements européens.
Enregistrer un commentaire